always alone and lost. (maggie)

always alone and lost
— maggie

nouvelle ville. nouvelle vie. nouveaux endroits à explorer. voilà ce qu'elisa essayait de se rentrer dans le crâne depuis plusieurs jours dans le but de ne pas déprimer. aujourd'hui, c'est la veille de noël, la fête préférée de la majeure partie de la population. aux yeux de la demoiselle, ce n'est qu'une fête commerciale qui sert à réunir une famille autour d'un bon repas au cours duquel on fait semblant d'être proche et aimé de tout le monde alors que c'est loin d'être le cas. la superficialité, très peu pour miss kerbinghton a qui décidé de fuir la maison pour la journée. elle a troqué sa paire d'escarpins préférée contre une paire de baskets chanel parce que de toute façon, personne n'est en mesure de la juger ici, dans ce trou à rat. elle a pris son portable dans la poche de son bomber et toujours accompagnée de sa légendaire paire de lunettes et de ses écouteurs, elle a emprunté les chemins hasardeux qui la menèrent jusqu'à la forêt. elle a traîné des pieds pendant plusieurs minutes avant d'en venir à la conclusion suivante : lakewood n'a vraiment rien pour plaire. de plus, elle se retrouvait désormais perdue au milieu de nulle part et elle savait pertinemment que ce n'est pas ses frères, ni même ses soeurs qui s'inquiéteraient de sa disparition. après tout, peut-être que c'est comme ça qu'elle doit s'effacer du monde. peut-être qu'elle est destinée à mourir seule, dans le froid glacial d'une ville inconnue aux yeux des plus grands.

“ we are ordinary people
so it's easy to get lost ”

Une nouvelle journée. Un lever de soleil qu'elle a observé d'un air distrait depuis la fenêtre, à peine voilé par un rideau opaque. Un soleil qui s'est levé hier et qui se lèvera aussi demain. Autrement dit, un jour comme les autres. Un jour où rien ne changera. Où rien n'ira mieux, sinon pire. Elle s'est levée de bonne heure. En réalité, cela fait bien longtemps que Maggie ne dort plus vraiment. Sans ses médicaments, il lui est impossible de se laisser aller au sommeil. Dès le premier pied posé au sol, Inox s'est manifesté. Caresses sur caresses, le malinois lui a bien fait comprendre qu'il avait besoin de sortir. Au même degré qu'elle a compris, elle aussi, qu'elle avait besoin de sortir.
Peu importe le jour, peu importe les fêtes, ici Margaret n'a personne. Sûrement pas de famille, pour tout dire. Alors, elle se contrefiche un peu des jours, des dates, des moments importants qui sont devenus indifférents. Quelques heures plus tard, la voilà dans une forêt épaisse. Le soleil peine à percer entre les feuillages épais, le sol est agréable, peuplé d'aiguilles humides. L'odeur de sève et de bois rend Maggie plus sereine. Elle se laisse happer par le calme de l'endroit, se surprenant même à chantonner discrètement, toujours entourée par Inox. Elle l'emmène partout. Il est son garde du corps. Depuis le jour où il lui a sauvé la vie.
Un froissement de feuilles attire son attention et elle se fige. En un seul instant, la clémence qui lui été accordée d'être plus tranquille lui est ôtée et un frisson ébranle son échine. Ressentant la tension de sa maîtresse, le malinois aboie immédiatement. Il y a quelqu'un. Ils ne sont pas seuls. La peur, cruelle, vient doucement enrober Maggie d'une couverture aussi glaciale que trompeuse. Il faut dire que la peur est devenue sa plus fidèle amie, depuis qu'elle s'en est sortie. Et si c'était lui ? Et s'il l'avait retrouvée ? Et si c'était un autre fou, caché dans les bois, qui n'attend que le passage d'une proie assez faible pour être capturée, de nouveau ? Elle se l'avoue assez facilement : elle qui se prenait pour une femme forte, elle n'a plus rien de tout ça. Elle revoit la cave, les murs sombres, l'air moite, la grille rouillée. Elle revoit tout comme si c'était hier. Terrorisée, elle n'ose plus bouger, et Inox qui aboie toujours dans la direction d'où venait les bruits.

always alone and lost
— maggie

elle a envie de jurer élisa. elle a envie de tout casser sauf qu'il n'y a rien à casser. elle serre les dents pour ne pas s'énerver alors que ça fait trois fois qu'elle passe devant cet arbre tout tordu qui n'a rien pour plaire, même pas son originalité. elle se dit que c'est foutu, qu'elle va terminer ses jours ici, dans le froid de lakewood, seule. si elle aurait su, elle se serait battue un peu plus avec les parents histoire de rester à livepool. elle ne comprend toujours pas la demoiselle. pourquoi elle a du quitté sa ville natale, ses amis, son université. pourquoi elle a du dire au revoir à sa réputation, à sa chambre de princesse et ses emmerdeurs de voisins. tout ce qu'elle demande éli, c'est de retrouver sa vie d'avant alors, elle ferme les yeux quelques secondes et rêve qu'elle n'est jamais partie.

et puis y a ce bruit qui la ramène à la réalité. un cri. un animal. peut-être un ours ? un loup ? elle avance doucement, dans le silence jusqu'à ce que son pied heurte une branche d'arbre déchue. alors, elle sursaute comme si c'était la fin du monde. son coeur rate un battement avant de battre à tout rompre. élisa, elle a envie de pleurer mais, elle est trop forte pour ça. quelques secondes plus tard, elle se retrouve en tête à tête avec un gros chien alors, elle ne peut faire autrement que de pousser un petit cri aigu en sautillant sur place comme si sa vie était foutue, terminée. ciao élisa, ravie de t'avoir rencontré !

Maggie retient son souffle. Elle ne respire plus du tout, en apnée totale. Ses yeux sont exorbités, elle s'imagine sûrement qu'il va sortir des fourrés un yéti ou bien un agresseur. Son agresseur. Elle commence à trembler. À ses pieds, Inox s'agite de plus en plus. Il jappe tout bas, ses yeux de chien allant de sa maîtresse à un point dans les fourrés que Maggie ne voit pas. Et d'un seul coup, il fonce droit dans les buissons et disparait. « Inox, non ! » Elle aurait aimé crier, mais ça n'est qu'un simple murmure qui sort de sa bouche. La voilà seule, à présent. Seule et terrorisée, plus encore qu'il y a quelques instants même si elle n'avait pas cru ça possible. Elle prend une grande goulée d'air, style compétition de plongée, avant de fermer de nouveau la bouche. Elle essaie de guetter le moindre son... et ce qui lui parvient est un petit cri. Un cri qui n'a rien d'agressif, plutôt de surprise. Et surtout, un cri qui n'appartient pas à un homme. Elle hésite, ne sait pas si elle peut se permettre de relâcher toute la tension qui paralyse ses muscles, mais elle essaie de faire un effort. Allez ma vieille, c'est sûrement rien ! Et puis faut que tu retrouves Inox ! Sans lui, elle n'est rien.
Sans lui, elle ne serait plus rien aujourd'hui. Peut-être même qu'elle serait morte, dans cette cave. Elle profite d'une micro-seconde où un semblant de courage fait surface pour foncer à son tour dans les broussailles. Les épines lui griffent les joues, les branches se prennent dans ses cheveux, mais ça n'a pas d'importance. Elle n'a maintenant qu'une idée en tête : retrouver son sauveur.
Elle débouche alors sur un petit trou dans les bois, où la lumière filtre un peu plus que sur le chemin. On dirait une clairière. En son centre, Inox est dressé tout droit devant une jeune fille qui semble visiblement terrorisée. Maggie aimerait bien trouver ça amusant si elle n'avait pas été aussi effrayée quelques secondes avant ça. Elle s'approche, soudainement rassurée, retrouvant force, couleur et souffle à peu près normal bien que toujours rapide. En attrapant Inox par son collier, elle lève les yeux vers la demoiselle. « Désolée s'il vous a fait peur, il n'est pas méchant. »

always alone and lost
— maggie

élisa est et restera sans doute toute sa vie le stéréotype parfait de la petite bourgeoise ignorant tout de la campagne. contrairement à certains de ses frères et soeurs, elle est sans doute beaucoup moins perchée, snobe, hautaine mais elle n'en reste pas moins une petite princesse dans l'âme. elle aime découvrir le monde qui l'entoure mais ce qui lui plaît le plus lorsqu'elle part à l'aventure, c'est retrouvé son confort habituel en rentrant à la maison. pour le coup, elle se dit que jamais plus elle ne verra le sourire de sa mère au réveil, les larmes de son père tellement si rares et pourtant présentes ces derniers temps. jamais elle ne pourra connaître la raison de ce déménagement et ses frères et soeurs seront surement contents d'obtenir une pièce de plus et une part d'attention de la part de leurs parents.

et puis finalement, ce bruit, ce n'était qu'un chien. un chien devant lequel elle reste pourtant pétrifiée. prise de panique, le coeur battant, elle ne peut s'empêcher de crier alors que la pression redescend petit à petit. l'effet de surprise est bien là. le fait qu'elle n'ait jamais eu de chien doit sans doute amplifier sa réaction. faut dire que teresa a répété à mainte et mainte reprise qu'il y avait assez de boulot avec les enfants pour qu'un chien s'y rajoute. et puis il semblerait que certains y soient allergique aussi mais là, éli ne peut l'affirmer. soudain une demoiselle débarque de nulle part pour attraper la bête par le collier en s'empressant de s'excuser. le son aigu qui sortait des lèvres de la jeune femme quelques minutes plus tôt s'est stop net pour laisser place à un essoufflement de soulagement. elle passe la main dans ses cheveux, à la fois rassurée mais se sentant également idiote d'avoir réagi ainsi. ce n'est rien... j'ai juste été surprise... je pensais être seule et il a débarqué de nulle part, comme par magie ! c'est surtout que maman a toujours dit de se méfier des animaux, en particulier ceux qu'on ne connait pas.